vendredi 4 novembre 2011

Pourquoi nos églises catholiques sont elles vides ?

« mes hommages, Ma Dame » « Mes Hommages, Mon Dieu. » 

« mes hommages, madame » : ce « grand bourgeois, catholique pratiquant » nous saluait de cette façon en arrivant dans sa demeure, avec le baise main approprié : codes, signes de savoir vivre.
Ce soir là et le lendemain matin avec cet hôte nous aurons un échange. Effectivement sa question de catholique pratiquant, qui ce jour de 1er novembre a été à la messe, constatant que ce n’était plus qu’une assemblée de séniors, essentiellement de femmes, nous orientait vers cette interrogation: pourquoi l’église catholique, du moins en occident, n’est plus porteuse?  pourquoi la France n’est-elle plus la fille ainée de l’Eglise ? J’ai réfléchi sérieusement à cette question pertinente et prometteuse pour un échange. Non, en fait il n’y aura pas d’échange, je croyais qu’il pouvait y avoir un échange, mais il y avait affirmation de sa suffisance, cette suffisance de personnes très bien, plus que bien, s’affichant en tout cas comme très biens, assurés dans leur morale, fidélité conjugale, réussites, la leur et celle de leur fille et petite fille, pensez donc elle avait un double doctorat et … Il en parlera très longuement de cette « réussite ». Dieu avait récompensé leur morale en leur accordant richesse, prospérité et sagesse: « les paroles dégoulinaient de leur bouche. » (image que j'apprécie et qui vient de la bouche de Job, cet autre riche que la vie étrillera!)
Il ne s'agit pas de s'opposer à la réussite ou à la richesse ou à la reconnaissance, j’ai réussi dans ma vie, à condition que cela ne ferme pas et que je reste ouvert à toutes les questions  et toujours à l’Ecoute et en progrès et en recherche.
Ainsi, sur l'évolution de notre église,  je pensais apporter ma perspective, cette perspective du « pas moral » que je suis, de ce déraciné, de ce chercheur de Dieu depuis 60 ans. J’espérais que ma réponse, peut être dérangeante, serait entendu. NON et j’en aurai la confirmation quand je lui apporterai une réponse à sa question… il n’écoutera pas… pourquoi «écouterait-il d’abord puisqu’il a tout : l’âge la réussite, un couple stable et sur le traversin, dans leur chambre, leurs pyjamas et chemises de nuit soigneusement pliés et repassés dans leurs housses, des Dior bien sûr, rite qui leur confirme la bénédiction de Dieu.
 Une élégance fine, je l’ai apprise dans ma vie à condition que cette élégance reflète une élégance de l’âme, de cette légèreté et de toujours du questionnement face à la vie, et non pas cette mort de l’assurance que Jésus traitera de « tombeaux blanchis à la chaux »
Ce soir là donc et le lendemain, puisqu’il connaissait mon « back ground » de jésuite, il m’interrogera, en boucle, sur « pourquoi les personnes ne vont plus à l’église catholique?  ». En fait je ne comprendrais pas que le fait d’être un jésuite « défroqué » m’avait déjà disqualifié, sans compter mes extractions modestes d’alsacien : sa famille, ses ancêtres lorrains de la partie allemande avaient, eux, décidé de quitter la Prusse pour choisir la France ! choisir la France, dans ce cas on n’a pas de problème d’identité quand ses arrières grands parents ont choisi la France ! (sic) Mes parents n’avaient pas eux fait ce choix! Mais je n’ai pas non plus de problème d’identité, je suis citoyen de notre village le Monde. En fait je ne comprendrais que le matin qu’il ne m’interrogeait pas pour entendre une réponse mais pour simplement mettre en défaut ceux qu’il interroge, mettre le doigt sur leur insuffisance pour se sentir valorisé. « Se dresser en abaissant ». Il se ventera d’ailleurs d’avoir ce même comportement dans toutes les instances auxquelles il participe dont le Rotary… parce que bien sûr à ce niveau on fait parti du Rotary, et du Rotary des élites (sic) celui de Paris Centre qui compte plus de 250 membres et où l’on reçoit tout le gratin du rotary et du monde.
Au Rotary, il y a comme partout dans ces clubs, comme chez les francs maçons dont j’ai fait aussi parti, des personnes qui s’engagent et agissent. 

Ce contact, en tout cas comme toujours, cadeau et provocation de la Vie, nouera en moi diverses pensées éparses:
  1. Mon travail sur Monsieur Job, histoire symbolique de ce « bon fidèle » de Dieu qui se fera bousculer par la Vie, tout lui sera « arraché » ; il ne comprendra plus rien et sera enfin conduit à se situer, vivant, à travers une révolte d’une violence extrême. Pour moi maintenant Job a un visage, le visage de ce bourgeois nanti et satisfait de lui-même avec même sur sa voiture la cocarde tricolore. 
  2. Des conversations avec des jeunes: ils ne peuvent plus dans une église s’agenouiiller et « vénérer » ce symbole chrétien d’un supplicié sur une croix, et cette communion où l’on mange le corps du Christ ! avec cette question du comportement des prêtres qui n’assument pas leur sexualité …. etc 
  3. Le soir même, cette révélation du fils de la famille « De Villiers ». A la télé, notre homme politique, de droite, défenseur des valeurs de la chrétienté et de l’Occident, catholique affiché, père d’une famille nombreuse, morale oblige, photo de famille tous souriant à la vie, entourant une femme, la mère,  apparemment fragile, silencieuse et souriante, tous « de l ‘aristocratie, l’élite » il est frappé de plein fouet par ce scandale de son fils benjamin qui accuse son frère d’inceste. Ce fils, surtout, pointe la non humanité de son milieu qui se veut l’élite et en est persuadé et dont la consigne est «tais-toi et pardonne». Combien de familles, soit disant bien, étouffent des comportements infâmes, mais « tais toi et puis d’ailleurs tu délires. » Ce père n’est pas un «homme» et sa mère semble une gamine, « bouquet de table ». 
  4. Enfin cette parabole de Jésus sur le pharisien et le publicain, parabole que j’actualise légèrement : aujourd’hui Jésus la raconterait peut-être cette façon:  
    • Deux hommes allèrent à l’église pour prier : Un bon catholique pratiquant et un « pas toujours très catholique »« dévoyé », perdu et en recherche dans la complexité de ce siècle et de la vie. Le bon catholique, debout, face à l’autel, au milieu, priait ainsi en lui-même : « Oh, mon Dieu, mes hommages, je te rends grâce de ce que je ne suis pas comme le reste des hommes qui sont rapaces, injustes, adultères, ou bien encore comme ce mec agenouillé là à l’entrée. Je vais à la messe tous les dimanches et je verse mon denier du culte. Et pour reprendre quasiment mot pour mot ce que me disait l’hôte. Merci mon Dieu. Ma réussite prouve ta magnanimité et la grandeur de notre occident. Le « mécréant », lui, restant au fond de l’église, à l’entrée, sur le côté, derrière une colonne, s’était mis à genoux… non pour s’humilier, mais il sentait inconsciemment que par ce geste symbolique traditionnel il enracinait son corps dans la réalité de la vie qui circule, il avait besoin de se rapprocher du sol, de s’encrer dans le sol, et il symbolisait sa recherche dans ce geste de respect voulu: « je me démène dans une vie difficile, et souvent je fais des erreurs, à la recherche d’un sens et d’un comportement pour ce monde et dans ce monde qui me fasse humain, je ne sais pas, je cherche,… je suis rentré ici dans cette église, non pas que j’y crois, car je n’arrive pas à «adorer» ce crucifix sur lequel je vois un pauvre bougre agoniser, je ne comprends plus le sens de tout cela et en plus l’église institution n’a aucun sens et ne présente qu’une caricature, avec ce pape et ces cardinaux en soutanes de soie, prétendant témoigner d’ un mec qui a prêché la pauvreté et la présence à la vie… et donc je rejette ce "cirque".  Mais ma démarche est une démarche de recherche pour que, un jour, dans mes cheminements et quêtes, je comprenne… je ne viens pas non plus quémender, car ma merde ou mes conneries, je me les avale et j’en suis responsable; je ne viens pas non plus te remercier, car ce que j’ai réussi je me le dois.. cette démarche, comme d’autres que je ferais, dans d’autres lieux pas très catholiques, et cela peut même être des lieux considérés comme de débauche, dans ma pérégrination, participe de ma recherche pour me créer humain et divin… toutefois, dans ces lieux, construits par des artistes et des mystiques, il y a sans doute des messages de vie que je pourrais décoder. Mais ce n’est pas l’église ni les curés qui m’aideront à les comprendre, depuis longtemps ils ont abandonné ce rôle de témoignage pour se draper dans une frime de richesse ostentatoire et de participation à des gueuletons entres bourgeois bien pensant. (quelques prêtres et religieux et religieuses sont encore témoins : je me demande simplement comment ils peuvent rester dans cette institution !) Jésus termine sa parabole par cette affirmation: celui ci descendra chez lui, plus juste, plus en accord avec la vie, l’autre non. Car quiconque s’élève sera abaissé, mais celui qui s’abaisse sera élevé.  
Enfin,  pour conclure et répondre réellement à la question initiale du pourquoi de la désertification des églises: 
  • je trouve sain que les jeunes n’aillent plus dans les églises, car de nombreux « religieux » ne témoignent pas de cette vitalité de la Vie, au delà de la morale bien pensante; ils sont là pour donner bonne conscience, ils n’éveillent pas à la conscience qui est recherche permanente. En plus ils sont incapables d’ouvrir aux symboles de la vie. La religion catholique ne témoigne plus du « religieux » 
    • Enfin j’amènerai une réponse plus « mystique ». Si je crois en Dieu, (mais là dès que je parlerai de cela mon hôte partira vaquer à ses occupations, me plantant là) croire en Dieu ! quelle rigolade, il s’agit d’être entre soi, entre gens bien pensant ! donc si je crois en Dieu, en la Vie et moi j’y crois, je crois en son action dans ce monde, je crois que lui-même a décidé de vider les églises, car il ne veut pas être pris pour celui que présente cette église là. 
Je veux participer à l’oeuvre de Dieu/Vie, en n’ayant plus aucun respect pour cette église qui présente de Dieu une image fausse et dévoyée. Bravo les jeunes qui rejettent cette caricature de Dieu. Ceci dit je vais continuer à m’inspirer des rituels et des œuvres de foi que non des religieux mais des artistes mystiques ont créés : cela vaut la peine de faire l’effort de comprendre ces démarches de la vie et de l’Art.

1 commentaire:

  1. On sent que cette visite t'a touché, énervé... Et il y a de quoi ! Tu fais le portrait non pas d'un croyant, chercheur de Dieu, mais d'un possédant assis sur ses certitudes. Ca existe dans tous les milieux.

    Au passage, pourquoi cela t'a-t-il tant touché ? Qu'est-ce que ça a blessé en toi ?

    En ce qui concerne la question initiale : pourquoi les églises sont-elles vides ? je crois que c'est dû à bcp de choses, mais principalement au fait que nous n'avons pas su nous laisser interpeller par la nouveauté radicale (je pèse mes mots) du christianisme, et que nous l'avons trop souvent transformé en un code moral (au mieux) ou un code bon chic, bon genre... et là, on ne se mélange pas avec n'importe qui, n'est-ce pas !!!
    Il n'empêche, et je le maintiens, je connais des gens, et j'espère en être, qui, à l'intérieur du "système", essaient de garder vivante la flamme de la quête de Dieu -ou de la Vie si tu préfères.
    Une note en passant :le "vénération" de la croix, je n'y vois pas d'abord le côté doloriste ; j'y vois surtout un type qui a aimé jusque là, qui a risqué sa vie pour être fidèle à ce qu'il savait de Dieu.
    Quant à la communion, combien savent qu'en avalant l'hostie, ce n'est pas le "truc" où Dieu s'est fourré, mais notre vie tout entière (avec ses relations aux autres) qui est incorporée dans la vie du Christ, ... Ce qui est légèrement différent. Je t'accorde que cela est mal expliqué, et n'a plus guère de sens pour beaucoup, sinon un rituel désuet... Et pourtant, il y a là de quoi faire exploser toutes nos limites.
    D'accord aussi pour fréquenter M. Job... il m'a toujours paru sympathique, celui-là ! Frédégonde

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