vendredi 22 avril 2011

Des exercices vers la réelle liberté.

Les exercices spirituels de Ignace de Loyola (1491-1556) sont un livret d’exercices pour entraîner sa dimension « spirituelle » « d’humanité », de la même façon qu'il faut  entrainer sa dimension physique, ou intellectuelle, ou....  Opuscule petit, inutile de l’acheter sauf pour votre culture, il n’est pas fait pour être lu, il est rédigé pour être pratiqué. Des exercices variés de techniques de méditations sous diverses formes, vibrant de contenus ajustés, dans une progression sur « 4 semaines », avec des suggestions pour « discerner », soutiennent les choix de vie, une vision de la Vie. Vers la Liberté engagée. (le titre complet des exercices est:   "Exercices pour ordonner sa vie sans se décider par aucun attachement qui soit désordonné." (je veux au fur et à mesure de ce blog vous faire part de cette démarche et vous permettre de vous l'approprier). Au cours de ma vie de jésuite, j’ai eu l’occasion de pratiquer la plénitude de cette démarche des « exercices spirituels, à 2 reprises, sur 1 mois à chaque fois, à raison de 5 heures de méditation par jour +…. dans la solitude d’un travail sur soi immergé avec le « Je suis qui je suis/serai» (« définition qui désigne « Dieu » la VIE, moi-même dans ma dimension d’humanité en construction»: définition de la Vie, de Dieu toujours ouverte, non  close). C’était en 1963 et 1964, pendant mon noviciat. Ensuite pendant 10 ans, tous les ans, j’en ferai une démarche raccourcie, ce que l’on appelle retraite de 8 à 10 jours… et il m’arrivera parfois de m’arrêter trois jours… mais tout au long de ma vie j’ai toujours gardé ce livre à porté de méditation. Je m’ y suis référé, en permanence, car comme le dit Ignace, pour des gens engagés dans la vie active ils peuvent faire des exercices au quotidien avec moins de fréquence, mais dans la constance. Et cela fait 45 ans d’approfondissement. Car si je m’y suis référé, je l’ai aussi développé, enrichi de ma propre expérience glanée dans d’autres cultures et pratiques.
Presque 50 ans après, cela m’a amené à une autre vie, une autre approche de la vie, une autre vision de la vie,  parfois sinon souvent à l’envers du « sens courant » ! pas toujours facile à combiner avec le monde ambiant,  pas toujours facile à partager!  Ce qui prime c’est d’être libre par rapport à la richesse et tous ses liens, le pouvoir et tous ses abus, la notoriété et toutes ses concessions, et je rajoute libre par rapport à toutes les formes de consommations et toutes les addictions : sexes, alcools, tabac, drogues, nourritures… tous ces "détachements" sont  fondamentaux pour devenir humain alors que ce qui prime dans notre société, est  chanté et loué, ce sont « richesse, pouvoir, célébrité et consommations». Ce "marcher à contre courant" doit toujours être confirmé, chaque jour. Comme je l’écrivais dans mon dernier message, la semaine sainte est un de ces moments où il faut repasser par le questionnement de ses choix, non pour des amputations mais pour des approfondissements qui incluent paradoxalement ce que l’on pensait sacrifier.

Pour illustrer cela, je veux prendre l’un des textes de prière de St Ignace ; elle sous tend la 3ème semaine, au moment d’entrer dans ce passage d’accompagnement avec Jésus et sa capacité à aller sans concession au bout de sa vision, vers une vie « éternelle/autre » : (l’on peut toujours rester bloqué et hérissé par le style ancien de ces textes et les rejeter…ou alors être capable de sentir ce qu’ils véhiculent en dessous ».
Je ne cherche ni ne m’attache à posséder la richesse plutôt que la pauvreté, à vouloir l’honneur plutôt que le déshonneur, à désirer une vie longue plutôt qu’une vie courte, je rajoute, à dévorer tout plutôt que de le contempler.
Et pour aller plus loin dans le choix de vie et l’engagement, Ignace poursuit :" je veux et je choisis la pauvreté avec le Christ pauvre plutôt que la richesse, les humiliations avec le Christ humilié plutôt que les honneurs, et je préfère être regardé comme un sot et un fou plutôt que comme un sage et un prudent en ce monde." Comme on dirait aujourd’hui, connaissant ses limites, il vaut mieux aller au delà, forcer le passage… et c’est pour cela que Ignace appelait cela les 3 humilités.
Relisez ces textes lentement : littérature que tout cela, messages à ranger au grenier des idées dépassées, inutiles, dangereuses, subversives…. En Décembre 1964, il y a  47 ans maintenant, c’était un choix que j’avais signé, j'ai su alors que ce choix était accepté par la Vie. Pourtant à travers ces choix différents, à contre courant, de liberté cultivée, approfondie, la Vie m’a gâté..je participe aujourd’hui de la vie, au delà des consommations et addictions quelles qu’elles soient. Alsacien, j’ai toujours pris les choses au sérieux. Et lors de cette Semaine Sainte, à 66 ans, je renouvelle consciemennt le contrat.

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